13 octobre 2024
Ce qui me reste du Burundi:
Un voyage de 24 jours au Burundi, ça change les perceptions et ça marque l'âme ! J'ai découvert qu'il y a plus que du papier et de l'eau qui manque dans ce pays...
Je suis allée au pays des vertes collines pour aider à l'éducation de communautés marquées par des conditions pénibles de vie et trop souvent de survie. J'y ai trouvé beaucoup d'accueil de la part des quelques personnes impliquées dans ce projet 'Mon Sac d'école', et une grande volonté de changement et d'aider la condition de leurs semblables dans ce pays ravagé par le guerre.
Ayant dépassé la richesse de la végétation tropicale et des palmiers, ce qui m'a frappé le plus est le manque de moyens de ces populations qui ont peu de ressources pour changer le cours de leur vie. Tout y est au ra-len-ti. Quand la priorité est de mettre du pain sur la table, de combattre la faim, de savoir sa famille à l'abri des intempéries et/ou de trouver du travail, il est facile de comprendre que plusieurs n'ont plus d'énergie à consacrer aux conditions sociales de leurs enfants. Trop d'enfants vont pieds nus et ont le ventre creux.
Malgré tout cela, quand le grand Jeff leur donnait leur sac d'école et leur demandait s'ils étaient contents, ces enfants soulevaient à bout de bras leur précieux sac en criant de joie et en remerciant le Canada. Une émotion puissante nous assaillait en les voyant replacer ce cadeau sur leur coeur et nous disait qu'ils avaient bien saisi ce que cela représentait. Ils savaient bien que c'est la seule façon de changer la destinée qui leur est réservée pour les années à venir, soit celle du spécialiste du tri au dépotoir municipal à proximité de leur camp de déplacés. Leurs parents, dont plusieurs sont illettrés, sont bien conscients de l'importance de ce sac, comme le dit si bien G. Danton:
« Après le pain, l'éducation est le premier besoin d'un peuple. »
C'est pourquoi les deux ou trois sacs restants après la distribution soulevaient la convoitise des parents. Ils savaient qu'ils recelaient les clefs de la VIE plutôt que la sentence de SURVIE... et ils avaient quelques minutes pour faire valoir que leur enfant méritait bien la hardiesse de leur action présente.
Ces remises de sacs nous font réfléchir sur la justice sociale et les inégalités liées à la place où un enfant nait. Est-ce que j'accepterais facilement que ma petite-fille Alice, âgée de 16 mois, toute blonde et si éveillée soit placée dans les conditions que connaîtra la petite Marilou dans un de ces camps de déplacés ? Une Marilou vaut autant pour sa mère que ma petite-fille Alice, pour sa maman...
Les ressources ne sont pas au rendez-vous pour encourager les différents éléments de la population à se regrouper pour se donner de meilleures conditions de vie (une source d'eau facilement accessible à proximité / réparer la pompe à eau si elle est brisée, favoriser l'éducation de la majorité, pour en venir à faire des décisions politiques plus favorables à leur réalité et au contrôle de leurs richesses naturelles; ne plus être à la merci des grandes compagnies, etc.) .
Les choses changent très lentement et j'espère que le compte-gouttes de l'éducation va leur donner la force dont ils ont tant besoin. Les grands élèves qui sont à la fin du secondaire (lycée) témoignent de leur volonté de revenir dans leur milieu et d'être des personnes-ressources ( médecins, professeurs, infirmiers, techniciens en informatique ou gestionnaires). Ils savent qu'ils sont les futurs artisans du changement qui doit s'opérer dans leur pays ; ils sont fiers de participer à l'assemblage des sacs d'école des plus jeunes et ont ainsi une chance de « passer au suivant », de témoigner de l'importance de l'éducation, et au mieux d'une éducation de qualité.
À l'heure de la mondialisation, il est intéressant d'aider ces populations à se donner de meilleurs moyens à long terme, même si c'est au compte-gouttes. Savoir que cela aidera ces jeunes à devenir des hommes libres qui seront des leviers dans leur communauté est encourageant. Le colonialisme est dépassé, nous voulons parler d'égal à égal avec des hommes libres qui contribueront à l'amélioration de leur milieu et n'auront pas à attendre les dons des sociétés 'soi-disant' mieux-nanties. Un homme libre est bien capable de faire les décisions qui seront les bonnes pour lui et sa famille, mais il a besoin d'un certain minimum pour cela et l'éducation y pourvoira.
Il me fait grand plaisir de continuer à aider le projet 'Mon Sac d'École' pour que mes enfants et mes petits-enfants sachent que nous sommes TOUS les habitants d'un grand village, sur une petite planète où les inégalités ne devraient pas avoir leur place. Une certaine justice sociale mérite notre réflexion et des gestes conséquents, même s'ils sont minimes valent bien la peine d'être posés. J'ai vu que leurs enfants et petits-enfants sont tout aussi importants que les miens le sont pour moi. J'ose tendre la main pour leur acheter un cahier de plus vers la liberté et le sens de réalisation personnelle que donne l'éducation.
Au plaisir de vous revoir dans une rencontre pour le projet annuel des sacs d'école.